Les visages de la transition : Lylou Sehili

Lylou Sehili

Elle rêve d’une vie qui permet : « moins d’heures de travail par semaine pour avoir plus de temps en famille, entre amis pour investir les structures démocratiques […] pour prendre soin les uns des autres, que le budget soit décidé collectivement pour rediriger l’argent pour que les communautés soient sécuritaires entre elles »

Lylou Sehili milite depuis maintenant 5 ans pour la justice environnementale et sociale. Elle est co-coordonnatrice chez Transition en commun à temps partiel et étudiante au certificat en coopération et en solidarité internationale à l’Université de Montréal (UDM), à Tiohtià:ke (Montréal). Elle a participé au Forum Mondial de l’Économie Sociale de 2023 à Dakar avec le comité exécutif de l’aile jeunesse du Chantier de l’économie sociale au Québec. 

Un profil en communication

Âgée de 22 ans, elle a commencé très jeune à débattre et à verbaliser ses idées autour de la table : « chez nous on est 6, famille méditerranéenne, on parle fort, on parle vite, on se coupe la parole, les dîners sont sportifs et si tout le monde est à  la maison, les dîners c’est une heure et on se jase ». Ce bagage familial lui a servi à bâtir son identité militante. 

Elle souligne que son profil n’est pas nécessaire pour militer et qu’au contraire, ce qui fait la force d’un mouvement, c’est la diversité des gens qui se mettent en action.

Son récit militant

Sa force à elle : rassembler. Lylou a commencé à militer pour la justice environnementale et sociale au CÉGEP de Maisonneuve en 2018 au sein du Comité vert. Après avoir participé à la création du devoir environnemental et collectif (DEC), elle est devenue co-porte-parole de la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social (CEVES)* pendant presque un an avant que la COVID n’arrive. Cette implication lui a permis de participer à l’organisation des manifestations du 15 mars et du 27 septembre 2019 : « on a organisé la plus grosse manifestation de l’histoire du Canada, il y avait 500 000 personnes dans les rues ». 

Le 8 octobre 2019, elle s’est fait arrêter lors d’une manifestation avec Extinction Rebellion. Une quarantaine de personnes bloquait la rue dans une tactique de désobéissance civile pour montrer leur colère par rapport à l’inaction politique qui avait suivi la manifestation du 27 septembre. Malgré qu’elle ne se referait pas arrêter, c’est un événement qui fait maintenant partie de son identité et elle ne le regrette pas.

Puis, en mars 2020, le momentum tambourinait toujours : on organisait une semaine de transition. C’était une semaine de grève avec des activités prévues pour la transition socio-écologique. Puis la COVID.

« Ça a été un coup dur », raconte-t-elle. Comme bien des personnes du milieu militant, ses activités se sont complètement arrêtées pendant la pandémie. C’est en prenant des marches quotidiennes dans son quartier Hochelaga-Maisonneuve qu’elle a pris conscience de l’importance de préserver le seul boisé de son quartier, dit terrain vague, contre l’expansion d’un port commercial de l’entreprise Ray-Mont Logistiques. Depuis, elle s’implique activement dans la lutte. Une semaine d’action et un camp climat ont d’ailleurs lieu du 4 au 10 juin 2023.

À l’automne 2022, elle a été introduite à l’économie sociale dans un cours à l’université. Elle y a découvert un modèle économique alternatif au capitalisme qui ne vise pas à faire du profit, mais plutôt à répondre à un besoin pour et par les personnes de la communauté. Cette proposition de système alternatif a résonné avec elle et l’a menée à devenir membre du comité exécutif de l’aile jeunesse du Chantier de l’économie sociale au Québec.

L’économie sociale a été pour elle la porte d’entrée de son militantisme dans le milieu professionnel. Lylou travaille désormais chez Transition en commun à temps partiel depuis février, à la Cité des Hospitalières. Son rôle de co-coordonnatrice est de faire le pont entre les mouvements sociaux citoyens et étudiants et les organisations institutionnelles pour réaliser la transition. Elle travaille avec les institutions, les tables de quartier, la société civile, les organismes communautaires et les arrondissements de Montréal.

Une transition nécessaire et centrale

En entrevue, Lylou semble avoir de la difficulté à expliquer sa motivation pour militer. Pour elle, ce n’est pas une question d’être possible ou impossible : c’est nécessaire. 

La transition pour elle s’inscrit dans une réorganisation de la société. Elle rêve d’une vie qui permet : « moins d’heures de travail par semaine pour avoir plus de temps en famille, entre amis pour investir les structures démocratiques […] pour prendre soin les uns des autres, que le budget soit décidé collectivement pour rediriger l’argent pour que les communautés soient sécuritaires entre elles ».  La transition, ça passe aussi par la collectivisation, moins de voitures, plus d’espaces verts et plus de bâtiments partagés. C’est central.