Les visages de la transition : Nicolas Chevalier

Nicolas Chevalier

« Agir pour la TSÉ, c'est surtout se sortir des structures invisibles du système en place.»

Nicolas Chevalier, coordinateurice et facilitateurice pour Justice climatique Montréal, se décrit comme une personne écologiste anti-coloniale et anti-capitaliste qui ne veut pas une suite de ce monde, mais celle d’un monde où cohabitent une vision décoloniale ancrée dans le territoire et ses Premiers Peuples et une économie solidaire décroissante.

Un changement de cap majeur

Après avoir travaillé une quinzaine d’années en sciage et forage de béton, Nicolas subit un choc; sa mère décède des suites d’un cancer du poumon généralisé. Cette épreuve entraîne un changement de cap majeur dans sa vie. Iel se découvre une passion pour les causes environnementales et entame alors un Baccalauréat en science environnementale.

Iel commence à s’impliquer dans différents groupes et la flamme de l’activisme s’allume. « J’ai commencé avec Divest Concordia et Justice Climatique Montréal en rencontrant des militantes dévouées et inspirantes qui avaient une approche décoloniale et anti-capitaliste de la lutte à la crise climatique et ses racines. J’ai aussi lancé un chapitre du Leap Manifesto avec beaucoup d’activistes d’expérience et novices, travaillant sur le démantèlement des silos et le désir d’avoir une compréhension plus complexe des racines des oppressions systémiques.»

Lors du Forum Social Mondial de 2016, Nicolas assiste à un panel au sujet du Leap Manifesto. Le travail conjoint des travailleurs et travailleuses, des académiques, des groupes citoyens et des membres de communautés marginalisées dont les Premiers Peuples présenté lors de ce panel l’emballe énormément et il devient alors évident pour Nicolas que la transition doit obligatoirement passer par la résurgence de ces populations opprimées. « Il faut que les relations entre les peuples et avec la planète soient empreintes de délicatesse et de prévenance. »

Se remettre en question

Pour opérer la transition, il faut avoir le courage de se remettre en question, de questionner toutes les valeurs acquises depuis notre enfance alors que nous avons grandi dans un système capitaliste racial et colonial, croit Nicolas. Il faut affronter la peur qui nous habite et les limites imposées à notre imaginaire collectif, tout en sortant de notre confort pour se changer soi-même et changer le monde. C’est d’ailleurs dans ce sens qu’iel travaille à organiser des espaces qui ouvrent au dialogue, au partage d’idées et de façons de faire autant traditionnelles à certains peuples que nouvelles pour celleux pris dans les maillages des systèmes d’oppression. « On doit apporter des perspectives radicales – qui parlent des racines des enjeux – à toutes les discussions sur les actions, stratégies et autres. Il faut mobiliser les communautés et les individus pour trouver la libération collective, tout en restant souverain à soi-même. »

Tout le monde doit se mettre en action, pense Nicolas, mais surtout celleux qui sentent déjà qu’iels n’ont pas leur place dans ce système qui leur demande de sacrifier leur vraie personne et leurs valeurs profondes. Nicolas espère voir un nouveau monde en ressortir avec un maillage de traditions anciennes et nouvelles à faire cohabiter ensemble. « Je voudrais convaincre celleux qui veulent et opèrent pour la destruction de la planète et toutes ses populations que le pouvoir est plutôt avec le peuple dans toute sa complexité et les mondes avec lesquels iels cohabitent. » 

« Se sortir des structures invisibles du système en place. »

En se questionnant sur ses motivations à œuvrer pour la transition socio-écologique, Nicolas répond qu’iel le fait pour les gens et les communautés qui existent en dehors des systèmes hégémoniques qui carburent à l’oppression, l’exploitation et l’effacement de peuples, de cultures et de la nature. « La sollicitude pour mon environnement m’a apporté à désapprendre les leçons qui grugeaient mon âme et à apprendre les multitudes de façons dont nous pouvons toustes vivre en harmonie avec les êtres humains et plus qu’humain. Chaque jour apporte une chance de supporter, collaborer et transformer les gens, les communautés et le système vers ces horizons. »

Selon Nicolas, la transition socio-écologique nous permettrait de finalement vivre notre pleine humanité, aucunement limité·es par des systèmes qui nous forcent à cacher, sacrifier et tuer une partie de notre être et de vivre toutes nos relations. «Pour moi, agir pour la transition socio-écologique c’est surtout se sortir des structures invisibles du système en place.»